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Chapitre 1

Bureau de Brisson – Sainte-Blandine, 1925

Dans cette sphère, située dans le bureau de Brisson, au cœur du village de Sainte-Blandine dans les hauteurs sud de Rimouski, nous nous retrouvons en 1925. Plusieurs objets reposent sur la table de travail du grand-père, dont une page du livre Souvenance.

Pionniers de Sainte-Blandine et famille métisse

Le grand-père Brisson, notre personnage mi-fictif, mi-réel, est un descendant des fondateurs de Sainte-Blandine. Ses ancêtres, établis à l’origine sur ces hautes terres en arrière de Rimouski, travaillaient surtout à l’exploitation forestière.

C’est en étudiant la généalogie des pionniers du village de Sainte-Blandine qu’on découvre que la famille Brisson est une famille métisse associée aux Wolastoquiyik du Bas-Saint-Laurent (autrefois nommés Malécites ou Etchemins).

Vers 1690, Charles Saint-Aubin, un fils du français Jean Serreau de Saint-Aubin, épouse une Wolastoqewi de la région de Passamaquoddy (Maine) et adopte le mode de vie de sa femme. Les Wolastoqiyik Saint-Aubin, connus aussi sous le patronyme Thomas, occupent ensuite la région de la rivière Saint-Jean au Nouveau-Brunswick. Trois des fils de Charles, comme lui, vivent selon le mode de vie traditionnel autochtone. Deux d’entre eux, Pierre et Joseph, deviennent chefs de leur communauté. Les arrière-petits-fils de ces derniers, Joseph et Louis-Thomas, obtiennent pour leur communauté la réserve de Viger en 1827. Plusieurs de leurs descendants occupent le poste de chef des Wolastoqiyik de la réserve de Viger puis celle de Cacouna.

Entre 1866 et 1915, plusieurs Saint-Aubin fréquentent la contrée de Rimouski, s’installent à Sainte-Blandine et s’unissent à des Brisson, descendants des colons canadiens du secteur. Ces familles métissées et leurs descendants habitent toujours le territoire. D’après les recensements de 1881 et de 1891, les Saint-Aubin sont désignés chasseurs. Leur territoire d’exploitation englobe vraisemblablement Sainte-Blandine, les lacs Macpès et le lieu-dit de la Pêche à l’Anguille, à la jonction du ruisseau du lac Chaud et de la rivière Rimouski. Avec les Saint-Aubin, les pionniers de Sainte-Blandine cultivent des lopins de terre, exploitent la forêt et chassent l’orignal et le caribou.

L’utilité des documents d’archives

Les documents d’archives permettent d’apprendre une multitude d’informations sur le mode de vie de nos ancêtres. Par exemple, les actes notariés, enregistrés selon des normes rigoureuses et conservés par Bibliothèque et Archives nationales du Québec, font office d’autorités et servent de preuves à l’égard de la propriété de biens, de la passation de ceux-ci, d’un contrat de mariage, etc.

On retrouve parmi ces actes des contrats qui nous permettent de découvrir la valeur de biens marchandés par les occupants de l’époque, comme des semences de patates ou de la graisse de marsouin. On peut également découvrir des inventaires après décès, soit des listes qui inventorient et évaluent tous les biens possédés par un ménage au moment du décès d’un des conjoints pour les partager entre les héritiers.

Registre d’état civil

On peut aussi documenter l’histoire des familles grâce aux registres des paroisses, dans lesquels on retrouve les actes des baptêmes, des mariages et des sépultures de nos ancêtres – avant que l’État civil ne prenne en charge ces registres dans les années 1960.

Changement de noms des Autochtones

Le mode de vie des Premières Nations, qui était caractérisé par une culture orale, un quotidien de subsistance dont les activités principales étaient la chasse, la pêche et la cueillette depuis près de 10 000 ans, fut complètement transformé en l’espace de sept siècles.

Les registres nous permettent par exemple de comprendre comment les noms des Premières Nations se sont transformés au fil des siècles en raison des mariages et baptêmes catholiques, de pressions et incitations gouvernementales et d’une conception différente des noms, prénoms et surnoms. Deux cents ans auparavant, en effet, les Wolastoqiyik portaient plutôt des noms d’origines autochtones tels que Pierre aouanous séque, Paul ouenascouémousy ou Pierre ancidémouét.

Mœurs et coutumes : exemples de contrats de vente

Les habitants de Sainte-Blandine de cette époque vivent principalement de la culture de la terre, de la chasse et de l’exploitation forestière.

Ces deux contrats de vente nous informent sur la vie quotidienne des ancêtres de M. Brisson et sur les gens qu’ils côtoient :

1866, 21 août : Notaire Désiré Bégin : Vente par David Yockel au Sieur Xavier St-Aubin :

« Abandonné au Sieur Xavier St-Aubin, chasseur et cultivateur demeurant au même lieu de St-Germain (…) une berge d’environ dix-huit à vingt pieds de quille avec toutes ses voiles, haussière, grapin et rames que l’acquéreur déclare bien connaître et l’avoir en sa possession (…) pour le prix et somme de quatre Louis courant que l’acquéreur promet et s’oblige de payer comme suit; savoir : 1e par la semence de trois minots et demi de seigle (qui croît sur une terre à lui appartenant à l’endroit nommé Ste-Blandine bornée au nord au quatrième rang au sud au sixième au sud-ouest à Pierre Déchêne et au nord-est à Pierre Brisson). 2e : Cinq minots & demi de patates croissant sur la terre de Pierre Brisson au dit lieu de Ste-Blandine par le nord d’un ruisseau qui se trouve au nord du chemin du front (…) 3e : Enfin par la graisse de deux pourcies [marsouin commun] aussitôt qu’il en tuera… »

1866, 23 août : Notaire Désiré Bégin : Vente par Thomas St-Aubin et autres à Uldéric Ruest :

« Thomas St-Aubin, Félix St-Aubin, François St-Aubin et François-Xavier St-Aubin, tous cultivateurs et chasseurs demeurant actuellement à St-Germain de Rimouski (…) cédé (…) 1e : La semence de deux minots & demi de patates qui croissent actuellement sur la terre du nommé Pierre Brisson à l’endroit nommé Ste-Blandine et au sud d’un ruisseau qui s’y trouve. 2e : La semence de deux minots d’orge qui croît actuellement sur la terre d’un nommé Nazaire Aimont au lieu appelé Ste-Blandine (…) pour par le dit acquéreur les recueillir quand bon lui semblera. (…) moyennant le prix et la somme de six piastres pour l’orge payable à demande en effets marchands, et les patates pour la somme de onze chelins et dix-huit sous que les vendeurs reconnaissent avoir eue et reçue dès avant ces présentes… »

Signé par François St-Aubin et François-Xavier St-Aubin : Xavier et François Étams.

Références

MÉDÉRIC TREMBLAY, Jean Paul. « Un homme de cette sorte, Jean Serreau de Saint-Aubin (1621-1705) », La Société historique acadienne, Les cahiers, vol. 13, no 3, septembre 1982.

MICHAUD. Ghislain. Les gardiens des portages : L’histoire des Malécites du Québec, Les Éditions GID, 2003, p. 179.

JOHNSON, Laurence, Louis Thomas-Saint-Aubin et sa famille. « Deux siècles et demi de diplomatie et de revendications malécites », Paléo-Québec, no 27.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec. Recensement de l’Acadie de 1708, sauvages de la rivière St-Jean.

BAnQ Rimouski, Greffe du notaire Pierre-Louis Gauvreau, 14 décembre 1864, Vente de maison par François-Étienne St-Aubin à Luc Sylvain.

TACHÉ, Joseph-Charles. Trois légendes de mon pays ou l’évangile ignoré, l’évangile prêché, l’évangile accepté, Imprimerie A. Côté et Cie, 1876.

Illustration : Chapitre 1